Guide pratique de l'hyperactivité dans l'hexagone

L'intoxication au plomb, cause possible d'hyperactivité

 

L'intoxication au plomb a été identifiée comme une cause possible de troubles d'apprentissages et d'hyperactivité : le saturnisme touche plus particulièrement les logements vêtustes. En effet, le plomb contenu dans les peintures est ingéré par les très jeunes enfants qui traînent souvent par terre et portent fréquemment leurs mains à la bouche. Cette intoxication est source de déficits irréversibles car le plomb se fixe dans le cerveau et n'est pas évacué par l'organisme.

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Extraits du rapport " Plomb dans l’environnement . Quels risques pour la santé ? Synthèse et recommandations "

Janvier 1999

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Le plomb affecte la neurotransmission glutamatergique impliquée dans la mémorisation et l'apprentissage

La variabilité des effets du plomb sur les différents systèmes de neurotransmission conduit à penser que le plombn'affecterait pas un système particulier, mais pourrait modifier l'efficacité d'une grande variété de transmissions au niveau du système nerveux central. Cependant, quelques études particulièrement convaincantes ont mis enévidence une action spécifique du plomb sur le système glutamatergique.

Le glutamate est le principal neurotransmetteur excitateur dans le cerveau. Le plomb interfère sur la transmission neuroexcitatrice glutamatergique en agissant sur une famille de récepteurs du glutamate, les récepteurs NMDA (N-méthyl-D- aspartate). Ces récepteurs sont en fait des canaux ioniques physiologiquement activés par la liaison conjointe du glutamate et de la glycine sur deux sites distincts. L'ouverture de ces canaux permet un influx important de sodium et de calcium. Les récepteurs NMDA sont impliqués au cours du développement dans la synaptogenèse et participent aux mécanismes élémentaires de mémorisation et d'apprentissage tels que la potentialisation à long terme (LTP).

Les études expérimentales sur des neurones en culture montrent que le plomb interfère avec la transmission glutamatergique selon un mécanisme biphasique dépendant de sa concentration. Des concentrations d'ion Pb2 + inférieures à 1 µM potentialisent la réponse glutamatergique NMDA lorsque la glycine est présente à des concentrations non saturantes. Une libération de glutamate trop importante ou trop prolongée provoque une mort neuronale par un mécanisme nécessitant un influx de calcium. Ce mécanisme neurotoxique pourrait avoir un rôle physiologique durant les étapes précoces de l'ontogenèse en éliminant les neurones surnuméraires. Cependant, durant la vie postnatale, le glutamate libéré de façon prolongée, après un épisode ischémique par exemple, est

partiellement responsable de la perte neuronale observée. De plus fortes concentrations de plomb diminuent les effets du glutamate sur le canal NMDA quand la glycine est présente à concentration saturante. Cette diminution de la transmission glutamatergique pourrait interférer avec les processus d'apprentissage et de mémorisation.

Ainsi, le plomb en augmentant ou en diminuant l'efficacité de la transmission glutamatergique (selon sa concentration et celle du cotransmetteur, la glycine) pourrait provoquer des anomalies du développement du système nerveux central durant son ontogenèse et avoir des effets variables sur la toxicité induite par le glutamate. Il convient aussi de rappeler qu'à concentration plus élevée, le plomb exerce un effet toxique sur les neurones comme sur beaucoup d'autres types cellulaires par apoptose ou nécrose, indépendamment de ses capacités à moduler la transmission glutamatergique.

Chez l'animal, le plomb perturbe tous les stades du développement foetal et entraîne des troubles sensoriels et des apprentissages

Les conséquences de l'imprégnation par le plomb pourraient résulter d'un effet direct du plomb sur les structures cérébrales. Ainsi, au cours du développement cérébral, le plomb perturbe certains mécanismes neurobiologiques fondamentaux : au niveau des neurones, il interfère avec des neurotransmetteurs excitateurs (glutamate et dopamine notamment) qui jouent le rôle de morphogènes ; il modifie aussi la fonction astrocytaire en retardant la différenciation des fibres gliales radiaires en astrocytes. Quoique diffuse, l'imprégnation du cerveau par le plomb concerne en particulier les structures cérébrales impliquées dans les processus de mémorisation et les apprentissages (hippocampe, amygdale, cortex préfrontal et cervelet).

Les études chez l'animal ont montré que l'imprégnation par le plomb était responsable d'anomalies de fermeture du tube neural. Elles corroborent certaines données épidémiologiques humaines montrant une association entre l'imprégnation au plomb pendant la grossesse et l'apparition de malformations foetales mineures ou suggérant un lien entre la teneur en plomb de l'eau (supérieure à 10 µg/l) et la survenue d'anomalies de fermeture du tube neural. Les études comportementales chez l'animal (singe, rat, poulet) permettent surtout de confirmer le rôle de l'imprégnation par le plomb à faibles doses dans la survenue ultérieure de troubles des apprentissages, de la mémoire spatiale et non spatiale ainsi que de défauts d'attention. Les dysfonctionnements des fonctions visuelles et auditives mises en évidences chez l'animal et chez l'enfant pourraient contribuer aux effets négatifs de faibles doses de plomb sur le développement cognitif.

L'ensemble de ces études démontrent la gravité de l'imprégnation anténatale et le rôle de l'imprégnation postnatale, mais les résultats ne permettent pas de conclure à l'existence d'une relation effet-dose linéaire ou d'un seuil. Le plomb pourrait également perturber les processus d'apprentissage par des effets indirects sur la croissance et la durée de la gestation. Il est en effet responsable de retards de croissance intrautérine, voire de naissances prématurées, dont on connaît les conséquences neurologiques à long terme sur les processus d'apprentissage et la survenue de troubles du comportement.

Une imprégnation par des doses de plomb donnant des plombémies comprises entre 100 et 400 µg/l est associée à une diminution des fonctions cognitives

Du fait de l'absence de symptomatologie spécifique chez l'enfant, la survenue d'effets toxiques subtils sur le système nerveux, en rapport avec une exposition au plomb mesurée par une plombémie en dessous de 400 µg/l, n'a été évoquée qu'au cours des deux dernières décennies par les études épidémiologiques.

Les études épidémiologiques (transversales et longitudinales) ont montré des associations entre l'exposition au plomb et des troubles du développement psychomoteur ou intellectuel et des troubles du comportement jusqu'à l'âge scolaire chez l'enfant. Ces associations ont été montrées pour des niveaux d'exposition variés et dans différentes populations. Il est difficile de différencier les aires cérébrales des fonctions cognitives spécifiquement touchées par l'exposition au plomb, mais différents résultats montrent que l'intégration visuo-motrice serait particulièrement affectée par le plomb. Pour le comportement, les troubles mis en lien avec l'exposition sont l'hyperactivité, l'inattention, l'impulsivité. Plusieurs études ont conclu à une persistance des effets du plomb sur le développement neuropsychique de l'enfant d'âge scolaire lorsque l'exposition a eu lieu durant la petite enfance, voire en phase prénatale.

Des niveaux croissants d'exposition (appréciés par la plombémie) sont corrélés à des scores décroissants pour les indices globaux du développement intellectuel, estimé par le quotient intellectuel (QI). Les résultats de méta-analyses donnent une fourchette de 1 à 3 points de baisse du QI pour une augmentation de 100 µg/l de la plombémie. Ces effets sur le QI constatés pour des plombémies entre 100 et 400 µg/l ne semblent pas importants au niveau individuel, mais ils le sont au niveau d'une population par le déplacement de la distribution des QI vers des valeurs plus faibles(figure 2). Une diminution de QI a également été montrée pour des plombémies inférieures à 100 µg/l, mais les résultats des études épidémiologiques divergent et une valeur seuil à partir de laquelle les effets sont mesurables ne peut être déterminée.

Les études épidémiologiques ne sont pas exemptes de problèmes méthodologiques liés à la mesure de l'exposition au plomb, à l'évaluation des fonctions cognitives par le QI et à l'existence de facteurs de confusionayant également un impact sur le développement de l'enfant. En raison de ces problèmes, la relation observée entre des expositions faibles au plomb et les altérations des fonctions cognitives chez l'enfant pourraient ne pas être la preuve d'un lien causal si les études expérimentales ne donnaient des arguments forts en faveur de ce lien.

 

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